Henri Baviéra, une fenêtre sur le monde

Depuis plus de 50 ans, le peintre et graveur natif de Saint-Paul de Vence développe une œuvre singulière mêlant recherches personnelles et production artistique.

Aujourd’hui résidant à Lorgues (83) où il a installé deux ateliers consacrés à la peinture et à la gravure - « le rêve de ma vie » comme il le souligne - Henri Baviéra expose pour la première fois en 1951. De ce long cheminement, on retient que l’artiste se méfie des courants de l’art contemporain qui ont parfois une fâcheuse tendance à surfer sur la vague de la mode. Preuve de la sincérité de la démarche, il a su également se renouveler sans jamais couper le fil conducteur qui le guide depuis un demi-siècle. Après avoir étudié diverses disciplines des arts plastiques, ses interrogations se développent autour d’un expressionnisme de la Nature (périodes minérale 1962 – 1966 et schématique 1968 – 1975) qui le mènera (1978 – 1987) vers des Archéologies de l’imaginaire, sorte de narration soutenue par un regard humaniste sur le monde et sa richesse intrinsèque.

Depuis, Baviéra évolue vers une expression plus épurée avec d’autres ouvertures qui prennent naturellement la forme de portes et de fenêtres. Son intention n’est pas de parvenir à une abstraction totale puisqu’il synthétise dans ses œuvres des éléments de l’univers pour mieux les intégrer. Pour cela, il use de techniques variées (huile, gouache, acrylique…), met au point des méthodes particulières de gravure qu’il extrait de la tradition avec notamment l’emploi de papiers chiffon ou l’invention de la polychromie en relief, une gravure originale à partir d’une plaque façonnée comme une toile. L’artiste construit ainsi une route solitaire dont il découvre et construit l’itinéraire chaque jour avec aujourd’hui des paysages très lumineux ou des parcelles d’horizons peuplées de signes et de formes.

Entre rêve et imaginaire, ses œuvres qui se regardent autant qu’elles se touchent, se parent d’un « bleu de Nice » ou d’ocres rougeoyants. Certaines, du reste, évoquent Mark Rothko ou les aplats de De Stael, son long séjour en Andalousie naguère n’y est probablement pas étranger. L’artiste se singularise aussi par le choix des titres qu’il considère comme les reliefs sonores (Kantra, Sorumca, Oraskan…) ressentis une fois la toile, le dessin ou la gravure achevés.

Henri Baviéra travaille également avec et pour d’autres artistes de renom (Arman, Ben, Cesar, Hartung, Malaval, Sosno, André Verdet…) et crée des livres objets, des lithographies ou des sérigraphies. Ce travail de plus de cinquante années révèle la mémoire sensible des individus et des civilisations dans un univers de symboles et d’idées où l’amour se positionne entre la vie et la mort. Ces silences, ces traces d’existences mais aussi toute la mémoire humaine plusieurs fois millénaire qui transpirent de cet œuvre apparaissent comme une réminiscence atavique. Celle-ci suggère en effet que le comportement animal de nos contemporains (guerres, acceptation de la famine…) n’est que la traduction (et tradition) d’un lointain passé.

Enfin, quelques mots sur son épouse qui, et bien que la discrétion la caractérise, participe en toute complicité à cette carrière effectuée essentiellement en dehors de nos frontières et sur les cinq continents. Alors que d’autres décelaient dans la Mer du Nord un dernier terrain vague, Henri Baviéra mobilise la vivacité de la couleur pour offrir en partage une jolie leçon de vie. Celle d’un artiste complet qui a su faire de la sienne une divine comédie.

Exposition Henri Baviéra, du 15 février au 10 mars 2007, Galeries du Fort Napoléon – la Seyne sur Mer, 04.94.87.83.43

Posté le 15 février 2007