Arthur H y était au Gaou

Arthur H n’est pas l’auteur de la série débile de Canal+, ni le fantôme d’un célèbre joueur de tennis. C’est tout simplement le fils du chanteur Jacques Higelin et de Nicole Courtois. Et comme la chanson, c’est un truc qui le bottait plus que gardien de prison (Son père avouera plus tard à la presse : « on sait pas pourquoi, il avait les capacités. »), ben il s’est lancé. Arthur H a dû prendre sur lui. Garçon solitaire, il est allé jusqu’à mettre les bouts à l’âge de 16 ans sur un vieux rafiot. Certains camarades de la CGT disent qu’aujourd’hui encore, il a du mal à accepter ses grandes oreilles. En tout cas, cette excroissance des lobes ne l’a pas empêché, le bel Arthur, de se jeter sur scène dès 1988.

Son dernier album, Négresse Blanche, est sorti au mois de mai 2003 chez Polydor. Certains disent que c’est l’un des plus aboutis de l’artiste. La voix et la musique y seraient caressantes, le jazz laisserait la place à une musique plus pop et s’appuyerait sur de l’électro savamment distillée. Alléchant, non ?

Arthur H est le genre de mec à distinguer les journalistes. Il accueille les vrais (Var Matin, La Marseillaise ; ne riez pas) dans sa loge et rejoint les faux (nous) sous les pins. De loin, il fait décontracté et sympa. En fait il est froid, limite autiste et vous-me-faîtes-chier, en tout cas très concis dans ses réponses.

Yaquoi : Sur un bateau à 16 ans, aux Etats-Unis pour la fac, dès le début de votre carrière des tournées en France mais aussi à l’étranger (Japon, Afrique). Est-ce que le titre de votre dernier album renvoie à votre cosmopolitisme ?
Arthur H : Oui. J’ai eu la chance de beaucoup voyager. Avec la musique, l’identité explose, on se sent citoyen de la planète.

Y : Vous faîtes du jazz mais sans le revendiquer et vous préférez mettre en avant la diversité de vos influences (musiques africaines, tziganes, brésiliennes). Cet éclectisme vous permet-il de continuer les voyages ?
A.H. : Ma musique est assez personnelle même si elle est métissée. Ces influences sont un peu comme des couleurs pour une peinture.

Y : Tout ça vous laisse un peu d’indépendance par rapport à un monde (celui du spectacle) qui aurait pu vous peser d’autant plus que vous en êtes directement issu ?
A.H. (ne comprend pas la question, on dira que c’est de notre faute) : Ca permet de prendre de la distance peut-être (toujours pas convaincu d’avoir compris la question).

Y : Vous avez déclaré que vous écoutiez peu de musique mais que vous étiez dans un environnement sonore, celui de la musique de fond de notre société. C’est quoi cette musique de fond : un contexte social ou votre discothèque personnelle ?
A.H. : Je n’ai pas beaucoup le temps d’écouter de la musique. Cette musique de fond, c’est plutôt une attitude générale. Il n’y a pas besoin de poser un disque sur la platine. J’ai plutôt envie de silence. On peut tellement écouter de musique aujourd’hui avec toutes les banques de données disponibles autour de nous que je préfère réduire le choix et découvrir des musiques par hasard pour avoir un rythme intérieur et être neuf sans trop de références.

Y : Vous étiez déçu de vendre moins de disques qu’à vos débuts alors que votre notoriété reste intacte. Aujourd’hui vous en avez pris votre parti. Cette prise de distance, c’est dû au phénomène Star Ac’ et au succès immédiat des chanteurs préfabriqués ?
A.H. : Je ne cherche pas le compromis. La chanson est un art populaire qui touche les gens. Il faut donc faire sa musique de tout son cœur.

Y : Et votre maison de disque ne vous met pas la pression ?
A.H. : C’est sûr qu’ils se font pas les couilles en or avec moi mais ils le savent et sont quand même content de m’avoir.

Y : Vous n’hésitez pas à prendre des risques sur scène (mariage à Los Angeles, tournée solo en piano). Vous avez prévu quelque chose ce soir, une exclu ?
A.H. : À un moment ou à un autre, je peux être complètement dingue sur scène.

Malheureusement, le nombre de spectateurs qui l’attendaient dans la fosse (3 selon la police) a refroidi ses ardeurs. Avec son combo (Laurent Robin, Brad Scott et Nicolas Repac), tous habillés très class (costard nœud pap’), Arthur H ne semble pas vouloir se démonter et entame son show avec enthousiasme, entre swing et jazz. Son humour n’est pas toujours du meilleur acabit mais c’est normal pour un mec fan du Gendarme et les Extraterrestres (cf. Epok, n°38). Le contrebassiste essaye de rivaliser avec des tours de magies à la Gérard Majax et si le premier rang glouglousse, le bide est total dès le second.

Tant pis, Arthur H vit sa musique et nous gratifie même d’une reprise des Doors (Alabama Song). Le meilleur morceau du concert.

Posté le 24 août 2003

P.S. : Arthur H, tu qualifies la position de Romain Goupil à propos de la guerre en Irak (celle de 2003) d’ « acte de bravoure » (Romain Goupil était l’avocat français de G.W. Bush). Mais dire des conneries pour passer à la télé, ce n’est pas de la bravoure, c’est de la routine. Et tu poursuis en déclarant que ta vision de la politique correspond un peu à ta musique : tu te places dans la différence. Y a une question qu’on a oublié de te poser : la dictature, c’est différent de la démocratie, on est en démocratie, tu te situes où ?

Photos : Julien