C’est mon chien qui me l’a dit, installation de Grégoire BEAUFILS

Galerie Le Bosphore

Et qu’a dit le chien à Grégoire Beaufils ? Tout simplement d’être un artiste libre, dégagé de tous les carcans ou colliers du monde que sont les concepts, systèmes, séries et autres contraintes à la mode, en suivant son seul flair, son instinct, ses élans d’enfant explorateur, ses amours pour les objets, les jeux et les assemblages, ses talents de magicien ....

"juste une fille", meuble de G. Beaufils
au mur, dessins de J.Y de Pierredon

Impossible d’attribuer un qualificatif à Grégoire B. : est-il peintre, est-il sculpteur, désigner, est-il récupérateur, découvreur, assembleur, constructeur ? au bord de tout cela, il est artiste-plasticien, point final. Son art est-il brut, néo-post-dadaïste, post-pop-art, expressionniste, récup’art, land-art, arte povera, ou bien encore art engagé ? Réponse : cela dépend de l’oeuvre, mais l’artiste ne nie pas son admiration pour un Duchamp, un Rauschenberg, un Miro ou une Louise Nevelson. Je dirais, pour l’affubler quand même d’un adjectif, qu’il est post-moderne, c’est-à-dire qu’il bannit toute frontière entre les divers modes de créativité et qu’il manie avec dextérité la citation , toput en restant lui-même.

sculpture de G. Beaufils

L’oeuvre de Grégoire B. est assemblage surprenant d’objets inattendus, trouvés au bord d’un chemin ou d’une plage, mis au rebut parce que cassés, mutilés, inutiles, rejetés par la nature, bois flottés, noeuds de bois, galets ou plumes, son oeuvre est une savante et parfois longue reconstruction, une ré-installation où les pauvres matériaux retrouvent leurs lettres de noblesse et leur autonomie en se mariant pour une nouvelle aventure : l’aventure que doit vivre toute oeuvre d’art, signée, datée, précieusement posée sur socle, dans une galerie, puis installée dans l’intimité d’un amoureux. Curieux destin que celui de ces objets, associés comme peuvent s’associer des idées qui se bousculent dans une tête, du coq à l’âne, mais conduits par le fil d’Ariane . Grégoire B. sauve les objets d’une mort probable ; tel un archéologue, il les exhume, il leur donne la chance de réapprendre à vivre avec d’autres, il met en valeur leur mémoire d’objet, mémoire gravée dans leur beauté usée, rouillée, patinée. Cet amour pour l’objet, il le tient sans doute de tous les métiers qui l’ont amené à se frotter ou se confronter aux mobiliers, aux bâtiments, à la publicité ou encore au cinéma et à la télévision ; cette folle envie de créer l’a pris alors qu’il participait à l’accrochage de l’exposition ”Tendances à New-York”, à la Salle du Jeu de Paume de Paris.

L’artiste nous propose aujourdhui un parcours chronologique de découverte de toutes les facettes de son art, : il nous donne tout d’abord à voir des photographies de seins gauches anonymes, (pourquoi gauches ? côté coeur ?). puis résume les divers épisodes de sa vie avec des bois peints, sorte de curriculum vitae plastique, au milieu se trouvent des lampes, des meubles antropomorphes, créations à part entière, vestiges de sa vie professionnelle de décorateur, une autre salle nous montre ses oeuvres récentes, enfin une dernière salle comprenant plusieurs installations nous indique quelques pistes sur ce “qu’il pourrait faire”, qu’il a fait cette fois-ci, mais qu’il n’est pas sûr de continuer à faire. Parce qu’anticiper, prévoir, ce serait se mettre un collier autour du cou, ce que lui déconseille formellement son chien...

Dénommée “juste une fille”, comme une chanson célèbre, cette sculpture-armoire-cabinet de curiosités est l’oeuvre charnière de Grégoire B. Cette forme gynomorphe, avec courbes féminines, yeux, seins, nombril, couleur peau, nous invite à entrer dans le secrets de son intimité et à lire ce qu’elle “a dans le ventre” en tirant l’un après l’autre les tiroirs, en ouvrant les portes, en cherchant les boîtes à trésor. Cette oeuvre, véritable tabernacle, cache à symboles, résume sans doute la nature profonde de l’artiste.

“Je ne prends pas l’art au sérieux, mais je mets tout mon sérieux dans l’art”, aime nous répéter Grégoire Beaufils, en citant un artiste célèbre, à moins que cette citation ne soit tout simplement de lui...

Dans la première salle, Grégoire B. invite généreusement une douzaine d’artistes, en hommage à la galerie le Bosphore et sur une partie des cimaises de la dernière salle sont accrochés les dessins de J.Y de Pierredon. Exemple de convivialité entre artistes...

Posté le 20 août 2001

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