A la Galerie FORMAT, "VIBRER", installation photo-graphique de Marie-Françoise Lequoy, & création musicale de Jean-Sébastien Mariage et Catherine Jauniaux

C’est une installation photo-graphique de Marie-Françoise Lequoy accompagnée d’une composition musicale de Jean-Sébastien Mariage avec guitare et voix de Catherine Jauniaux, et d’un texte de Denyse Carmagnolle
C’est au vieux village de Fox Amphoux (Var)
C’est à la nouvelle galerie Format, créée par les artistes Michel Muraour et Angelica Julner

Cest tous les samedis et dimanches de 15h à 18H
C’est jusqu’au 30 mai
C’est un événement du réseau c’est bien parti

LIGNES DE FLOTTAISON

Par Lilyane Rose

Feu, air, lumière, eau. Des éléments intemporels dans la création artistique depuis toujours et aujourd’hui encore sources d’inspiration pour des artistes contemporains. Des « matières » informelles, des gageures plastiques. Comment s’emparer de l’insaisissable ? La plasticienne Marie-Françoise Lequoy qui expose acutellement à la galerie Format de Fox-Amphoux y a consacré toute une vie de réflexion et de recherche. Cependant, l’exposition « Vibrer  » doit se voir non comme un aboutissement mais comme un moment dans son travail, une sorte d’arrêt sur image dont on soupçonne qu’il n’est pas définitif.

Vous avez dit insaisissable ? Comme c’est insais… !

Et si l’insaisissable était :

  • Une surface ?
    Ce pourrait être un miroir, ou de l’eau, ou ce qui se passe entre des lignes ;
  • Une image ?
    Celle flottante et évanouie des mâts de bateaux dans un port : une apparition plutôt qu’une apparence.
  • Une forme ?
    Plutôt une ligne, des lignes qui se croisent et s’interfèrent, parfois en de fugitifs moirages, ou en labyrinthes.
  • Une couleur ?
    Pas une seule (un bleu, un blanc ?), mais des jeux de vibrations, des interactions-chocs de contrastes qui irradient comme des néons, à la limite de la perception visulle.
  • Une dimension ?
    … ?

Une piste peut-être du côté de Gaston Bachelard « En ce qui touche ma rêverie, ce n’est pas l’infini que je trouve dans l’eau, c’est la profondeur. »*


Il faut lire l’exposition comme un parcours de création artistique, comme un fragment d’une œuvre en cours, l’enregistrement d’un travail qui produit l’image. Quels cheminements nous conduisent-ils d’un album de photographies de mâts aux « carrés-induits-déduits-détruits  » par exemple ?

Pour MF Lequoy, la réalité sert d’appui initial (événement dramatique d’un incendie, trames, petite pierre striée, tableaux de Caspar. D. Friedrich, entre autres). Ici, pour «  Vibrer  », les images réunies en deux albums ne sont pas manipulées :

les reflets, les lignes perturbées des mâts, les couleurs improbables ne sont que des constats, bien sûr filtrés par l’œil d’une artiste. Car, si ces photographies recèlent en eux-même toutes les problématiques de son travail plastique, elles ne constituent qu’une matière première, une étape vers la dématérialisation des images via l’illisibilité, l’effacement, la disparition.*


Fragmentation, multiplication, éclatements, effets d’optique. Le regard du spectateur ne sait plus sur quoi se focaliser. Cependant, on n’est jamais dans l’informel. Malgré l’énergie chromatique libérée par le rouge et le vert ou le bleu et le noir, qui se contractent jusqu’à ce que leurs surfaces papillonnent et s’amenuisent, troublant la perception de leurs limites, quelque chose dans ce chaos empêche de se perdre totalement : ces images, issues du travail sur ordinateur, obéissent à une texture numérique, comme celles qui naissaient de la superposition des trames en singalette des premières expositions (1980). Dans ce grouillement d’énergies, différents ordres sont lisibles séparément. Un travail de dématérialisation dont naît paradoxalement une nouvelle matière, profilérante et en expansion.**

Notre monde moderne est obsédé par l’invisible ; tenter d’intégrer dans une œuvre plastique la perception de l’impalpable, de l’immatériel, peut aussi être une prise de conscience mystique d’un certain ordre de l’univers.


Comprendre pour apprécier une œuvre, retrouver le processus qui l’a engendrée : M.F. Lequoy nous invite, pour finir, à nous asseoir et prendre un moment afin de suivre le chemin visuel et sonore d’une des ces ondes marines. C’est comme si on ouvrait une boîte noire qui reconstitue le parcours, enregistre le temps et l’espace, en direct. Dans « la boîte », une ligne, une guitare (Jean-Sébastien Mariage) et une voix féminine (Catherine Jauniaux) se superposent en de mutuels contrepoints. Ultime tentative vers l’insaisissable, M.F Lequoy diminue la chose à regarder en restant toutefois dans le monde sensible, sans soustraire à la vue cette « ligne enfermée » chère à Piero Manzoni. Des ondes, ne subsistent que des lignes comme matériaux purs, qui se prolongent et se perpétuent d’une œuvre à l’autre, se dissolvent et se brisent. Des lignes qui ne limitent et ne délimitent rien.***

« Une ligne, on ne peut que la tracer à l’infini, en dehors de tout problème de composition ou de dimension - Dans l ‘espace total, il n’existe pas de dimensions… »
Pier Manzoni


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* « Reflets  », photographies de reflets dans les ports, diverses propositions de présentation
** « Contrastes simultanés », infographies sur papier fine art
*** « Onde nautique  », photo-graphisme sur papier, accompagné d’une composition musicale de Jean-Sébastien Mariage avec guitare et voix de Catherine Jauniaux, boîte noire de map, contenant livret avec textes des auteurs et de Denyse Carmagnolle, la composition photographique sur bande enroulée, le CD audio
**** Mezzanine de la galerie Format avec "onde nautique" déployée et sa boîte noire, au fond un contraste simultané


Texte de Lilyane Rose
Crédit photograhique Alain Arditi et MFL, courtesy Format et MFL


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Posté le 1er avril 2016