DE TERRE ET DE MARBRE, CÉRAMIQUES D’ AINSLEY/MURAOUR AU PAVILLON DE LA ROCHE TAILLÉE, JEUNE GALERIE CRÉÉE PAR SUZETTE RICCIOTTI

JUSQU’AU 9 MAI

Par Lilyane ROSE

Quoi de mieux que cette petite galerie (*) entre terre et mer pour nous faire découvrir le travail à quatre mains de deux artistes qui n’ont d’abord en commun que de résider dans le Haut-Var. Un décor d’origine du monde, de ciel, d’eau, de roche pour accueillir leur "Série Venus", fruit d’une collaboration inattendue entre le peintre (Christiane Ainsley) et le céramiste (Michel Muraour) . L’un est connu pour ses terres sobres, sévères, monolithiques, l’autre, "patauge" dans la peinture, fait bouillonner, exploser ses couleurs. Un projet artistique aussi improbable que le mariage de la carpe et du lapin - le silence et l’exubérance - l’une chante, l’autre pas, et pourtant …

Sur une étroite console de métal et de béton s’aligne sagement une série de pots de marbres surmontés d’une "chose" en céramique débordante. On ne peut manquer d’identifier ces pots, si lisses, à la perfection mécanique, comme des objets funéraires qui ont traversé les époques et les modes ; fausses urnes, faux vases ne pouvant rien contenir sinon des fleurs artificielles. Nous sommes dans le domaine de la mémoire ; mais rien de mélancolique dans ces explosions sensuelles et chahutées comme des éclats de rire. Entre bruit et silence, attirance et répulsion, la matière, sans cérémonie ("à la fortune du pot" !) peut grouiller, se déchiqueter, se replier, se comprimer, jaillir sans retenue de l’étranglement de ces vases qui ont du mal à la contenir. Les artistes s’autorisent même la liberté de "rater" l’émaillage, la couleur ou la cuisson !

Mais ce désordre apparent est contrebalancé par l’unité de la forme qui suggère celle d’un contenant mystérieux dont on ne sait plus où est l’intérieur et l’extérieur, le dessus et le dessous. Des offrandes ambiguës de nourriture votives, gourmandes et pétrifiées, des hymnes à la vie, et, si l’image n’était pas éculée, une renaissance des cendres – Comme un moment suspendu, éphémère et infini.
Et, ce qui ne gâte rien, ces pièces sont d’une esthétique indéniable.

La place de la double identité à l’œuvre peut alors se poser : quelle est la part de l’un et de l’autre, du féminin et du masculin ?
L’art aurait-il un sexe ? Pour le marbre, notre œil anthropomorphique a déjà fait le lien : les courbes "féminines" et la taille étranglée des vases sont une évidence ; mais pour la terre, le façonnage, féminin ou masculin ? Quelles mains pour le plein et le vide, l’horizontalité et la verticalité, le comprimé et l’expansé, le lisse et le rugueux, le mat et le brillant, la stabilité et le mouvement, le moule, le ventre, le jaillissement jouissif de la matière, l’écume de l’émail … ? Entre autres.

L’art a-t-il un sexe ? Pour autant que la question puisse se poser, l’important toutefois est qu’il s’agisse d’Art – et là, je crois bien que c’est le cas

Rédaction : Lilyane ROSE
Crédit photographique : C. AINSLEY
Mise en page : MFLP

(*) Le Pavillon de la Roche Taillée, créé par Suzette Ricciotti a été inauguré en mai 2014 à l’occasion de Photomed, avec des œuvres de François Delebecque.
C’est au 2014 route de Bandol, à Sanary, dans ce pavillon qui jouxte la route et qui domine la bai de Bandol, que Suzette Ricciotti, riche d’une première expérience de galeriste à Paris, nous entraîne dans l’aventure de l’art contemporain. Jeune galerie à suivre.

L’exposition est prolongée jusqu’au 9 mai
ouvert du jeudi au samedi de 5 à 7 et sur rendez-vous au 06 73 67 49 39
Baie de Bandol 83110 SANARY

https://www.facebook.com/pages/AinsleyMuraour/903777306300385?fref=ts
http://www.proame.net/art-is-life-expo-ainsleymuraour-creamique-dart-et-dessais-a-la-galerie-xxi-a-paris-juquau-17-janier-2015/

Posté le 14 avril 2015